lundi 13 janvier 2014

The Immigrant

The Immigrant de James Gray (2013)

Première image, la liberté. La grande statue qui ouvre les portes de la liberté, les portes de New York. Il flotte un brouillard qui ne suffit pourtant pas à voiler un bateau de migrants qui glisse vers un avenir meilleur. Il transporte l'espoir. Des centaines, des milliers de déracinés vont tenter de repartir à zéro. Ils attendent une nouvelle vie, de nouvelles personnes qui leur ouvriront de nouveaux chemins. Leurs bagages sont peu de choses à côté de leur mémoire et leurs sentiments. Il faut se montrer digne de cette terre d'accueil et d'abord être en bonne santé pour ne pas risquer l'expulsion.
Ewa et sa soeur Magda sont là, à portée de cette liberté. Mais Magda est malade. Séparation. Ewa tentera tout pour retrouver sa soeur, seule petite lueur du passé. Seule identité. Il faut s'offrir aux hommes pour espérer gagner cette liberté qui n'est finalement pas gratuite. Le moindre billet doit se payer. À qui sourire ici-bas, dans cet enfer où tout est codifié selon des règles que l'on ignore, quand bien même on parlerait la même langue. Il faut alors se déguiser avant de montrer sa chair. Se déguiser en fille de joie, après avoir porté bien haut le même flambeau que la grande statue du port de New York. On singe la liberté à défaut de la toucher du bout des doigts.
Quelqu'un vous sauve, vous lui devez tout et pourtant. Pourtant, il est comme vous, il peine à survivre, quand bien même il parle la langue et connaît les codes. Il y a bel et bien des choses qui vous dépassent. Et ce sont ces choses qui vous grillent la chair au fer rouge. Difficile de les camoufler, d'en réchapper si ce n'est de partir encore. Retenter sa chance ailleurs, revivre à nouveau, renaître.
Tout autour de vous est plus fort. Alors il faut tenter de tenir sur le fil tendu, chercher l'équilibre jusqu'au déchirement des balles, des conflits, de l'ivresse. Il y a des événements inéluctables. Bruno, le sauveur, n'a rien d'autre à offrir que cette débauche protégée, à l'abri des rouages dévastateurs et sans pitié de la bonne société. Ewa l'attendra à la sortie de prison, comme « Casque d'or* » attend l'arrivée de « Jo » avant qu'elle ne l'aide à s'évader. Bruno et Ewa, deux êtres à la dérive. Mais Ewa est déjà déracinée, elle a donc la force de repartir avec sa petite parcelle d'identité sauvée du passé, Magda, sa soeur. En route pour une nouvelle vie. À l'abri de l'injustice, cette fois.

*Casque d'or, un film de Jacques Becker de 1962.

Image extraite du film.



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