« Centimètre par centimètre, j'allais me fondre dans mon futur imprévu. »
Eva Kristina Mindszenti
« Bénits soient les brefs instants, les millimètres,
et les ombres des toutes petites choses, encore plus humbles qu'elles ! »
Fernando Pessoa*
Entre aujourd'hui et demain, il se déploie, il s'étire. Il retisse ses mailles sans fin, par-dessus les précédentes, celles que l'on croyait figées. Je lance ma main, je pousse mon pied qui glisse sur le parquet : la première frôle l'interrupteur, le second effleure la plinthe. Demain ils ne seront toujours pas atteints, cependant j'aurai gagné quand même. J'aurai parcouru un espace, j'aurai dépassé une limite. S'il n'y avait pas à se dépêcher d'être, je pourrais m'y consacrer avec le temps qui lui convient le mieux, c'est-à-dire un temps sans borne, une horloge sans aiguilles. Je pourrais en faire ma raison de vivre sans ces tâches quotidiennes : manger, établir un contact avec les autres, nettoyer sa table de travail... Mais paradoxalement, ce sont dans ces actes là aussi qu'il se laisse apercevoir.
Je suis maintenant auréolé par lui, le millimètre est partout. Mes mouvements sont des successions d'aventures silencieuses, sans témoin. Je saccade désormais la danse désarticulée que j'ai mise des années à concevoir. Ou plutôt que mon corps a patiemment élaborée. Les rayons de mon soleil sont stroboscopiques mais la musique ne joue que pour moi. Je ne m'amuse pas, je travaille. Je défriche le millimètre et la terre est aride. Rien n'y pousse que les racines de la confiance en soi, mais il faut encore se baisser pour les arracher à l'épiderme que je foule. Dans ce territoire que j'ai à parcourir, l'horizon me nargue juste sous mon nez. Ni mirage, ni feux follets, il est campé là, bien tangible, à portée de la main, à quelques centimètres.
Je suis maintenant auréolé par lui, le millimètre est partout. Mes mouvements sont des successions d'aventures silencieuses, sans témoin. Je saccade désormais la danse désarticulée que j'ai mise des années à concevoir. Ou plutôt que mon corps a patiemment élaborée. Les rayons de mon soleil sont stroboscopiques mais la musique ne joue que pour moi. Je ne m'amuse pas, je travaille. Je défriche le millimètre et la terre est aride. Rien n'y pousse que les racines de la confiance en soi, mais il faut encore se baisser pour les arracher à l'épiderme que je foule. Dans ce territoire que j'ai à parcourir, l'horizon me nargue juste sous mon nez. Ni mirage, ni feux follets, il est campé là, bien tangible, à portée de la main, à quelques centimètres.
* Fernando Pessoa, Le livre de l'intranquilité, Grands textes, Christian Bourgois Éditeur, p. 553 (1913-1935).
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